Gazole et sans-plomb : pourquoi toutes les conditions sont réunies pour un maintien des prix élevés à la pompe
Le coup de pouce de l'Etat stoppé, quelques jours ont suffi pour que décolle le prix des carburants à la pompe, au-delà des dix centimes de cette aide. Prix du brut et du pétrole raffiné, risque de récession, concurrence sur les marchés et boycott des productions russes dessinent de prochaines semaines coûteuses pour les automobilistes et les professionnels de la route.
Ce premier vendredi de janvier, sur le site du ministère de la Transition énergétique, le croisement des courbes sur le relevé hebdomadaire des prix des produits pétroliers interroge. D'une part, le cours du pétrole brut - le Brent -, qui descend ; de l'autre la remontée du gazole de 13,3 centimes d'€/litre en une semaine et, plus marquée encore, celle du sans-plomb 95-E10 de 19,2 centimes. Bien plus que les 10 centimes liés à l'arrêt de l'aide d'État le 31 décembre.
Les prix des carburants en forte hausse depuis le 1er janvier pic.twitter.com/yTxMGJ4pyq
— BFMTV (@BFMTV) January 10, 2023
Il faudra attendre les prochains relevés, le 13 janvier tout d'abord, pour avoir confirmation d'un niveau élevé durable des prix, mais il fait peu de doute. Selon le site carbu.com, ce mercredi, le prix moyen des carburants en France est en hausse de un centime par rapport à vendredi, 1,843€ pour le sans-plomb 95-E10, 1,905€ pour le gazole. Alors que le baril de Brent "traîne" autour de 80,8$, en très légère augmentation, 1,5%.
1 - La fin de la remise gouvernementale
Ces dix centimes de moins sont redevenus dix centimes de plus le 1er janvier. Mais d'où provient la différence avec l'augmentation réelle ? "Si l'un seulement des distributeurs de carburant, en France, avait communiqué sur sa propre remise, indique Olivier Gantois, à propos des dix centimes décidés par TotalEnergies, d'autres en avaient également consenti", observe le président de l'Ufip, l'Union française des industries pétrolières, sous la pression d'un marché français "le plus concurrentiel d'Europe". Elles se sont éteintes simultanément et "cela a eu un effet sur le prix moyen au litre", c'est un début d'explication.
2 - Le pétrole brut reste onéreux
Nous sommes loin des 112,69$ le baril de juin 2022, qui avaient porté le litre de gazole jusqu'à 2,16€ à la fin du printemps, et assez nettement en dessous du prix moyen de l'année écoulée, 100$. Mais le prix de "ce déterminant de base, dit Olivier Gantois, se maintient à un niveau relativement ferme", celui qui était le sien avant la guerre en Ukraine, lorsque les marchés étaient sous tension du fait de la relance économique.
"Depuis un mois, on est sur une sorte de plateau, une espèce d'équilibre s'est créé" entre deux forces. Le risque constitué par le troisième producteur mondial, la Russie, impliqué dans la guerre en Ukraine, qui tire les prix vers le haut, se confronte à la crainte d'une baisse de la demande mondiale due à la récession de grandes économies, qui les ferait reculer. "Si les producteurs de pétrole considèrent que ce prix est un bon équilibre", il perdurera.
3 - Les produits raffinés plus chers en Europe
Ce prix n'est pas mondial, contrairement au brut, mais continental. En Europe, il est fixé à Rotterdam. Et depuis près d'un an, il est plus cher qu'ailleurs, une "prime, explique Olivier Gantois, liée à la nervosité des marchés pétroliers, la crainte d'un manque de gazole à l'avenir". Un surcoût, la marge de raffinage, que les vendeurs, ceux qui ont du pétrole en stock, appliquent et que les acheteurs sont prêts à payer "parce qu'ils ont peur de manquer".
Le fait, selon la note publiée lundi par l'ex-Institut français du pétrole, l'IFPÉnergies nouvelles, que l'Europe dépende "toujours de la Russie pour près de la moitié de ses importations" de diesel entretient cette appréhension, a justifié des achats massifs en décembre et donc des prix hauts qui se répercutent.
4 - Embargo : quel effet sur les prix ?
Michel-Édouard Leclerc s'est montré alarmiste, dimanche, en annonçant une forte hausse des carburants d'ici mars. S'il admet que "les faits pourraient me donner tort", le président de l'Ufip ne partage pas cette position et se "veut rassurant ; ça n'aura pas beaucoup d'effet".
"Les pays qui avaient décidé ce plafonnement avaient déjà décidé un embargo sur le brut au 5 décembre et sur le gazole au 5 février. La plupart des acheteurs ont anticipé : certains ont arrêté leurs achats auprès de la Russie dès le début du conflit, d'autres ont commencé à chercher des sources d'approvisionnement alternatives dès l'embargo décidé." Et Olivier Gantois d'insister : "Si je tiens ce discours, c'est parce qu'il y a des faits, des certitudes derrière ces mots."
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