Colère des agriculteurs de Lozère : un barrage filtrant installé sur l'autoroute A75 à hauteur de Marvejols
Les agriculteurs de Lozère ont bloqué l'A75 dans les deux sens à hauteur de Marvejols, mercredi 24 janvier 2024. Ils rejoignent le mouvement de colère du monde agricole démarré jeudi dernier. Le barrage devait être levé à 18h.
L'échangeur du Buisson sur l'A75, à hauteur de Marvejols, ressemblait ce mercredi 24 janvier 2024 à un camp fortifié d'irréductibles agriculteurs. La colère de la profession, démarrée la semaine dernière, a gagné les campagnes lozériennes. Ils étaient au moins 200 professionnels rassemblés aux premières heures de la matinée aux abords de l'autoroute, afin d'établir des barrages filtrants dans les deux sens de circulation, avec l'appui logistique de la gendarmerie.
L'idée : forcer les automobilistes et les routiers à sortir de l'autoroute pour rerentrer immédiatement. Afin de distribuer tracts et revendications aux quidams. Parmi les manifestants, de jeunes apprentis, des exploitants exaspérés de leur rémunération et quelques anciens venus en soutien.
Des apprentis inquiets pour leur avenir
Dorian, Ejuan, Lenny, apprentis ou jeunes salariés dans des exploitations, observent depuis le pont enjambant l'autoroute la longue file de tracteurs obstruant les voies : "Nous aimerions vivre de notre métier. C'est plus que difficile. Nous sommes trop dépendants des aides de l'Europe et de toutes ces normes variables suivant les pays. Nous craignons tous pour notre avenir", disent-ils. "Je suis apprenti du côté d'Aumont-Aubrac. J'aimerais, plus tard, m'installer sur la ferme de mes grands-parents. Enfin, si je peux... il y a l'envie mais cela fait peur", s'alarme Dorian.
Un peu plus loin, Alain observe, lui aussi, l'asphalte vidé de son contenu. Il était exploitant agricole à Saint-Georges-de-Lévéjac : "J'ai dû arrêter mon exploitation laitière car je n'étais pas dans les normes. On m'a obligé à faire un bâtiment, avec des salles de traite. Je n'ai pas pu payer les dettes. Je n'avais pas assez de bêtes. Et pas assez de terres pour augmenter mon cheptel." Une vis sans fin qui a conduit l'exploitant à la faillite : "Tout a été saisi, je suis passé en procédure. Cela a duré quatorze ans", souffle-t-il. "Je ne suis pas à la rue, j'ai une petite pension. Mais j'ai été au RSA." Il touche 860 € par mois.
Le travail n'est pas rentabilisé
Sur le rond-point jouxtant l'échangeur du Buisson, beaucoup d'exploitants font le pied de grue, comme Michel, de Fau-de-Peyre : "La vie d'agriculteur devient très difficile, avec toutes les charges. Nous dégageons très peu de revenus, 700 à 800 euros. Il y a trop de viande étrangère sur le marché français. Ils sortent des prix plus bas que nous". Il s'étonne également de l'écart du prix du lait au départ de la ferme et à l'arrivée, dans le panier du consommateur : "Il faut acheter la nourriture pour nos bêtes." Son troupeau est composé de 40 vaches de race simmental pour la traite et d'une cinquantaine d'aubracs pour la viande : "Nous revendons entre 5,5 et 6 euros le kilo d'une bête sur pied, annonce-t-il. Le travail n'est pas rentabilisé." Michel est sans concession : "Que cela soit la salade, les tomates, la viande, tout ce qui touche à l'agriculture doit être revu. Il faut diminuer nos charges. Nous travaillons avec des tracteurs, il faut que le gasoil reste détaxé". Il reste inquiet, comme beaucoup, pour les générations futures.
Sur la bretelle de sortie côté sud, la queue de voitures et de camions grossit. Beaucoup de routiers font part de leur solidarité à coups de puissants klaxons. Les automobilistes ne sont pas en reste : "Je comprends leurs motivations. Il faut trouver des solutions", s'exclame l'un d’eux. "Cela se passe bien", se félicite Quentin, qui distribue tract sur tract. "Nous leur expliquons, ils comprennent. À part quelques-uns qui ne sont pas très contents, tout va bien !", sourit-il. Un peu plus tôt dans la matinée, une minute de silence a été observée par la corporation pour l'agricultrice et sa fille tuées dans un accident routier sur un barrage mardi 23 janvier à l'aube. Des brassards blancs étaient arborés par la plupart des barragistes, en signe de deuil.
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